
L’activité partielle des personnes vulnérables : les nouveaux critères depuis le 27 septembre 2021
Découvrez l’article « L’activité partielle des personnes vulnérables : les nouveaux critères depuis le 27 septembre 2021 » de Maître Lucie FRANCO – Avocat exerçant en droit social chez Aurore Avocats à Paris – paru dans la revue juridique lexbase.

Contenu de l’article :
En raison de la crise sanitaire, le recours au télétravail est devenu la norme et le placement en activité partielle pour les personnes vulnérables était étendu. Aujourd’hui, le retour au travail en présentiel est à nouveau mis en œuvre. Néanmoins le bénéfice de l’activité partielles pour les salariés justifiant d’une situation médicale particulière est maintenu, sous réserve que les critères réglementaires fixés pour déterminer leur vulnérabilité soient respectés. Afin d’adapter ces critères à l’évolution de la situation sanitaire, ceux-ci sont modifiés depuis le 27 septembre 2021, en application d’un décret du 8 septembre 2021.
En raison de la crise sanitaire qui a émergé au début de l’année 2020, des mesures n’ont cessé d’être prises pour protéger les personnes vulnérables et particulièrement les salariés sur le lieu de travail.
En effet, les entreprises ont dû s’adapter pour poursuivre leur activité dans un contexte sanitaire sans précédent.
En ce sens, l’article 20 de la loi du 25 avril 2020 prévoit la possibilité de placer en activité partielle des salariés de droit privé, à compter du 1er mai 2020, se trouvant dans l’impossibilité de continuer à travailler à distance et
considérés comme personnes vulnérables [1].
Cet article précise les cas dans lesquels les salariés peuvent être reconnus comme des personnes vulnérables susceptibles de développer des formes graves de covid-19 et bénéficier, ainsi, du dispositif d’activité partielle.
Afin d’appliquer la loi susvisée, divers décrets ont été pris pour fixer les critères permettant de définir les salariés vulnérables pouvant bénéficier de ce dispositif, qui ont évolué au cours de la crise sanitaire, dont le dernier était celui du 10 novembre 2020 [2].
Mais l’évolution de la situation sanitaire et l’avancée de la vaccination ont entrainé l’adaptation des critères précédemment établis quant au recours à l’activité partielle.
Le dernier décret du 10 novembre 2020 est donc abrogé au bénéfice du décret du 8 septembre 2021 qui fixe, en effet, « une nouvelle liste de critères permettant de définir les personnes vulnérables » bénéficiant du placement en activité partielle. Ce nouveau dispositif est entré en vigueur le 27 septembre 2021 [3].
1 – Activité partielle des personnes vulnérables : qui peut en bénéficier à compter du 27 septembre 2021 ?
Les critères réglementaires définis par le décret du 8 septembre 2021 s’appliquent au salarié considéré comme une personne vulnérable présentant un risque de développer une forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2 [4].
Les nouveaux critères établis sont différenciés selon deux catégories de salariés :
- les salariés non-sévèrement immunodéprimés : pour pouvoir bénéficier du dispositif de l’activité partielle, cette catégorie de salariés doit remplir 3 critères cumulatifs ;
- les salariés sévèrement immunodéprimés : pour pouvoir bénéficier du dispositif de l’activité partielle, cette catégorie de salariés doit remplir 2 critères cumulatifs.
Les modalités de placement en activité partielle seront donc présentées pour chacun de ces deux cas.
1er cas : salariés non-sévèrement immunodéprimés
a) être âgé de 65 ans et plus ;
b) avoir des antécédents (ATCD) cardiovasculaires : hypertension artérielle compliquée (avec complications cardiaques, rénales et vasculo- cérébrales), ATCD d’accident vasculaire cérébral ou de coronaropathie, de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV ;
c) avoir un diabète non équilibré ou présentant des complications ;
d) présenter une pathologie chronique respiratoire susceptible de décompenser lors d’une infection virale (broncho pneumopathie obstructive, asthme sévère, fibrose pulmonaire, syndrome d’apnées du sommeil, mucoviscidose notamment) ; |
e) présenter une insuffisance rénale chronique sévère ; | ||
f) être atteint de cancer évolutif sous traitement (hors hormonothérapie) ; | ||
g) présenter une obésité (indice de masse corporelle (IMC) > 30 kgm2) ; | ||
1er critère : | ||
1er cas : Salariés non-sévèrement immunodéprimés devant remplir 3 critères cumulatifs |
Être dans l’une des situations suivantes : | h) être atteint d’une immunodépression congénitale ou acquise, non sévère liée à une hémopathie maligne en cours de traitement :
médicamenteuse : chimiothérapie anticancéreuse, traitement immunosuppresseur, biothérapie et/ou cortico- thérapie à dose immunosuppressive ; infection à VIH non contrôlée ou avec des CD4 < 200/mm3 ; consécutive à une greffe d’organe solide ou de cellules souches hématopoïétiques ; |
i) être atteint de cirrhose au stade B du score de Child Pugh au moins ; | ||
j) présenter un syndrome drépanocytaire majeur ou ayant un antécédent de splénectomie ; | ||
k) être au troisième trimestre de la grossesse ; | ||
l) être atteint d’une maladie du motoneurone, d’une myasthénie grave, de sclérose en plaques, de la maladie de Parkinson, de paralysie cérébrale, de quadriplégie ou hémiplégie, d’une tumeur maligne primitive cérébrale, d’une maladie cérébelleuse progressive ou d’une maladie rare ; | ||
m) être atteint de trisomie 21. | ||
2ème critère |
Être affecté à un poste de travail susceptible de les exposer à de fortes densités virales. | |
3ème critère |
Ne pas pouvoir ni recourir totalement au télétravail, ni bénéficier des mesures de protection renforcées précisées ci-dessous. |
2ème cas : salariés sévèrement immunodéprimés
a) avoir reçu une transplantation d’organe ou de cellules souches hématopoïétiques ; | ||
b) être sous chimiothérapie lymphopéniante ; | ||
2ème cas : salariés sévèrement immunodéprimés devant remplir 2 critères cumulatifs |
1er critère :
Être dans l’une des situations suivantes : |
c) être traités par des médicaments immunosuppresseurs forts, comme les antimétabolites (cellcept, myfortic, mycophénolate mofétil, imurel, azathioprine) et les AntiCD20 (rituximab : Mabthera, Rixathon, Truxima) ;
d) être dialysés chroniques ;
e) au cas par cas, être sous immunosuppresseurs sans relever des catégories susmentionnées ou être porteur d’un déficit immunitaire primitif. |
2ème critère |
Ne pas pouvoir recourir totalement au télétravail. |
2 – Quelles sont les mesures de protection renforcées ?
Les salariés non-sévèrement immunodéprimés remplissant les deux premiers critères mentionnés ci-dessus devront bénéficier des mesures renforcées suivantes qui sont cumulatives pour retrouver leur poste en présentiel :
- l’isolement du poste de travail, notamment par la mise à disposition d’un bureau individuel ou, à défaut, son aménagement, pour limiter au maximum le risque d’exposition, en particulier par l’adaptation des horaires ou la mise en place de protections matérielles ;
- le respect, sur le lieu de travail et en tout lieu fréquenté par la personne à l’occasion de son activité professionnelle, de gestes barrières renforcés : hygiène des mains renforcée, port systématique d’un masque de type chirurgical lorsque la distanciation physique ne peut être respectée ou en milieu clos, avec changement de ce masque au moins toutes les quatre heures et avant ce délai s’il est mouillé ou humide ;
- l’absence ou la limitation du partage du poste de travail ;
- le nettoyage et la désinfection du poste de travail et des surfaces touchées par la personne au moins en début et en fin de poste, en particulier lorsque ce poste est partagé ;
- une adaptation des horaires d’arrivée et de départ et des éventuels autres déplacements professionnels, compte tenu des moyens de transport utilisés par la personne, afin d’y éviter les heures d’affluence ;
- la mise à disposition par l’employeur de masques de type chirurgical en nombre suffisant pour couvrir les trajets entre le domicile et le lieu de travail lorsque la personne recourt à des moyens de transport collectifs.
En l’absence de mise en œuvre de ces mesures renforcées par l’employeur, le salarié peut saisir le médecin du travail qui se prononce, si besoin avec le concours de l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail, sur la possibilité
de poursuite ou de reprise du travail en présentiel.
Dans l’attente de de l’avis du médecin du travail, le salarié est placé en activité partielle.
3 – Le salarié non-sévèrement immunodéprimé peut-il être placé en position d’activité partielle en cas de contre-indication à la vaccination ?
Le salarié non-sévèrement immunodéprimé entrant dans l’une des situations du premier critère qui ne peut pas totalement recourir au télétravail peut être placé en position d’activité partielle s’il justifie, par la présentation d’un certificat médical, d’une contre-indication à la vaccination.
L’appréciation par un médecin d’une contre-indication doit être effectuée au cas par cas.
4 – L’employeur peut-il contester le placement en activité partielle d’un salarié non- sévèrement immunodéprimé ?
Lorsque l’employeur estime que le poste de travail du salarié qui demande le placement en activité partielle n’est pas susceptible de l’exposer à de fortes densités virales (critère n°2), il peut saisir le médecin du travail, si besoin avec le concours de l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail, qui devra se prononcer sur le respect de ce critère et vérifiera la mise en œuvre des mesures de protection renforcées dont bénéficie le salarié concerné.
Dans l’attente de l’avis du médecin du travail, le salarié est placé en activité partielle.
5 – Le salarié immunodéprimé doit-il réintégrer les locaux s’il bénéficie de mesures de protection renforcées ?
Dans le cas des salariés immunodéprimés, le critère de mesures de protection renforcées ne s’applique pas.
Ainsi, le salarié immunodéprimé remplissant les deux critères développés ci-avant n’a pas à réintégrer les locaux de l’entreprise même s’il peut bénéficier des mesures de protection renforcées.
6 – Comment s’effectue le placement en activité partielle ?
Que le salarié soit sévèrement immunodéprimé ou non, le placement du salarié en activité partielle est effectué de la même manière, c’est-à-dire à la demande du salarié et sur présentation à l’employeur d’un certificat établi par un médecin.
En l’absence de respect de l’une de ces conditions, le salarié ne pourra bénéficier du dispositif d’activité partielle.
*
Les nouveaux critères ainsi établis s’inscrivent dans une volonté d’adaptabilité du dispositif d’activité partielle à la situation sanitaire. Ces nouveaux critères seront, peut-être, à nouveau modifiés à l’avenir afin de s’adapter aux évolutions à venir.
Il est également à noter que le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques a pris une circulaire le 9 septembre 2021 pour adapter à la fonction publique les dispositions du décret n° 2021-1162 du 08 septembre 2021 [5].
Cette circulaire se substitue à la circulaire du 10 novembre 2020, relative à l’identification et aux modalités de prise en charge des agents publics civils reconnus personnes vulnérables [6].
[1] Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020, de finances rectificative pour 2020 ( N° Lexbase : L7438LWE), 20.
[2] Décret n° 2020-521 du 5 mai 2020, définissant les critères permettant d’identifier les salariés vulnérables présentant un risque de développer une forme grave d’infection au virus SARS-CoV-2 et pouvant être placés en activité partielle au titre de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L8165LWC) ; décret n° 2020-1098 du 29 août 2020, pris pour l’application de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L0800LYB ), art. 2 et 4 ; décret n° 2020-1365 du 10 novembre 2020, pris pour l’application de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L6430LYS).
[3] Décret n° 2021-1162 du 8 septembre 2021, pris pour l’application de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L8490L7L).
[4] Deux premiers alinéas du I de l’article 20 de la loi n° 2020-473 du 25 avril 2020, de finances rectificative pour 2020 (N° Lexbase : L7438LWE).
[5] Circulaire du 9 septembre 2021, relative à l’identification et aux modalités de protection des agents publics civils reconnus vulnérables à la covid-19 [en ligne].
[6] Circulaire du 10 novembre 2020, relative à l’identification et aux modalités de prise en charge des agents publics civils reconnus personnes vulnérables.
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